Tout change....
Jean GONDRY
La période actuelle n’est pas sans nous poser questions concernant la prévention des lésions gynécologiques HPV induites ; les changements annoncés ou attendu concernent non seulement le dépistage mais aussi la prévention primaire.
En ce qui concerne le dépistage, deux évolutions ou révolutions vont voir le jour : tout d’abord l’organisation qui se met en place au niveau national. L’état d’avancement de cette organisation est très variable d’une région à l’autre mais l’envoi des invitations aux patientes n’ayant pas eu de frottis depuis 3 ans doit débuter en ce très proche début 2020 ; il n’est pas certain que le suivi des dépistages positifs et le contrôle de la pertinence de la prise en charge soit tout à fait finalisé mais la première étape de l’organisation se met en place.
Le rapport de la Haute Autorité de Santé, recommandant le test HPV en première intention (suivi d’un frottis de triage) chez les patientes de plus de 30 ans est venu un peu déstabiliser le démarrage national du dépistage ; en effet, si le changement de test n’impacte pas directement le praticien préleveur, les laboratoires, qui communiquent les résultats au centre régional de dépistage, sont les plus concernés par cette modification. Le praticien quant à lui va voir l’arbre décisionnel modifié ; le colposcopiste sera dans ce schéma régulièrement sollicité et comme auparavant sa pertinence pour choisir le site de biopsie sera un élément indispensable à la réussite de ce programme de prévention du cancer du col utérin.
Encore plus récemment, l’INCA a publié les recommandations concernant le suivi post thérapeutique ; aujourd’hui le test HPV à 6 mois est le moyen reconnu le plus efficace pour reconnaitre les échecs thérapeutiques. Là encore, la colposcopie sera la pierre angulaire de la prise en charge (diagnostique et thérapeutique). Concernant ces évolutions, le praticien est à l’heure actuelle, dans une situation difficile car le test HPV dans les indications pré citées n’est pas remboursé ; doit on informer la patiente que la littérature apporte les preuves d’une meilleure efficacité avec les outils plus récents mais que nous ne les utiliserons pas tant que cela ne sera pas remboursé ou proposera-t-on ce type d’outil aux patientes qui acceptent (et peuvent) ne pas être remboursées ? Il est urgent que la situation évolue afin que l’on puisse offrir les mêmes services à l’ensemble de la population. La SFCPCV à laquelle se sont associés la Fédération du Collège des Gynécologues Médicaux et le Collège des Gynécologues Obstétriciens, a sollicité un rendez-vous sur le sujet au Ministère de la Santé.
La prévention primaire par la vaccination anti HPV en France est toujours à un taux très insuffisant si l’on veut voir un impact en santé publique ; pourtant les preuves cliniques en population réelle sont aujourd’hui publiées dans les pays européens qui nous entourent. Il est certain que les professionnels attendent une vaccination commune aux garçons et aux filles de 11 à 14 ans qui aurait l’avantage de prévenir non seulement le cancer du col mais aussi les autres localisations et notamment le cancer de l’anus et une grande partie des cancers de l’oropharynx (pour lesquels aujourd’hui le dépistage n’existe pas).
Il est important de saluer l’efficacité du frottis qui a fait diminuer de plus de la moitié les cancers du col utérin en France ; les cancers invasifs observés aujourd’hui en France sont dans plus de ¾ des cas liés à l’absence de dépistage ou à une mauvaise prise en charge. Le changement de test améliorera peut-être un peu la performance mais sans organisation et sans prise en charge optimale, les résultats ne seront pas au rendez-vous !
Chacun doit donc s’impliquer dans ce combat contre l’absence de vaccination, contre l’absence de dépistage. Le colposcopiste qui reste la pierre angulaire du diagnostic final, du traitement et de la surveillance doit avoir à cœur d’être toujours meilleur en suivant l’actualité de la pathologie HPV induite et en participant à des formations continues (cf charte de qualité en pathologie cervicale).
La SFCPCV vous attend les 10 et 11 janvier pour le congrès annuel où tous ces sujets seront abordés et discutés avec l’éclairage de nos cousins du Québec. Comme habituellement, des sessions de cas cliniques et d’images colposcopiques nous permettront d’améliorer notre pratique quotidienne.
Au plaisir de vous retrouver très prochainement à Paris (le Beffroi de Montrouge).