Extrait du livre : Santé sexuelle et reproductive des personnes LGBT (Masson éditeur)


Un des 12 chapitres de ce livre coordonné par Philippe Faucher et Danielle Hassoun et Thelma Linet est consacré à l’infection par HPV.

Les différentes situations sont étudiées à la lecture de la littérature et l’on peut prendre conscience des difficultés particulières et de la forte prévalence de l’infection HPV alors que le dépistage et la prévention secondaire des cancers HPV induits met en évidence des difficultés particulières que nous résumons dans le commentaire ci-dessous.

HPV chez les lesbiennes/bisexuelles
L’étude de la littérature montre que les femmes bisexuelles ont un risque de   cancer du col de l'utérus plus élevé que femmes hétérosexuelles ; ainsi, sur un échantillon de femmes lesbiennes, l’ADN d’un HPV est détecté dans 30% des cas. Même chez les femmes rapportant ne jamais avoir eu de rapport sexuel avec un homme, l’ADN d’un HPV est détecté dans 19% des cas et des lésions intra épithéliales dans 14% des cas. Le dépistage du cancer du col doit donc se faire selon les recommandations nationales chez les femmes quelle que soit leur orientation sexuelle.

HPV chez les hommes homosexuels (HSH)
Les homosexuels masculins ne font pas parti du dépistage et sont peu informés sur les pathologies HPV induites pourtant la localisation anale de l’HPV a le même potentiel de transformation cellulaire que celle du col utérin (mais avec une fréquence moins importante d’évolution vers le cancer).  Concernant lésions précancéreuses anales (AIN de haut grade) chez les HSH séronégatifs, une méta-analyse a rapporté une prévalence très élevée de celle-ci (21,5 %) ; le risque de développer un cancer anal est environ 20 fois plus important chez les HSH en comparaison aux HSF. De plus, l'incidence du cancer anal est significativement plus élevée (risque quasi multiplié par 10) chez les HSH vivant avec le VIH que chez les HSH séronégatifs.

HPV chez les femmes transgenres (TGF)
Très peu d’études existent sur les problèmes de santé liés à l’HPV chez les femmes transgenres.  Sur une série de jeunes adultes non vaccinés âgés de 18 à 26 ans la  prévalence rapportée de tout type de HPV dans les écouvillons anaux auto-prélevés est de 88,6 % chez 44 femmes transgenres, contre 70,9 % chez 855 HSH (homme ayant des rapports sexuels avec les hommes). L’association avec le VIH  (sur une étude de 22 femmes transgenres) est inquiétante puisque 95 % présentaient des résultats de cytologie anale anormaux et 59 % présentaient une lésion malpighienne intraépithéliale (HSIL) ou un carcinome épidermoïde (SCC) de haut grade.

Le dépistage du cancer du col de l'utérus n'est pas nécessaire chez les femmes trans qui ont subi une vaginoplastie parce qu'elles n'ont pas de col de l'utérus. Le néovagin est généralement tapissé de la peau du pénis kératinisé, et les preuves suggèrent que le risque de néoplasie est extrêmement faible. Dans les cas où une vaginoplastie est réalisée à l'aide d’un segment sigmoïde, le suivi à long terme n'a pas montré d'augmentation risque de cancer du côlon dans le lambeau néovaginal.

Bien que ces personnes ne soient pas à risque de cancer du col de l'utérus, elles sont à risque de contracter le HPV et développer des lésions dans la région génitale après des chirurgies de réassignation du sexe. En effet le gland du pénis et son prépuce, qui sont utilisé pour recréer le clitoris et les petites lèvres lors d'une vaginoplastie, sont plus susceptibles d'être infecté par le HPV que le pénis des hommes cisgenres. Des examens cliniques réguliers visuels sont donc nécessaires.

HPV chez les hommes transgenres (TGM)
 La majorité des TGM ont toujours leur utérus (et donc leur col utérin). L’hystérectomie n’est pas requise pour le changement d’identité dans la majorité des pays d’Europe.

Cette conservation fréquente du col avec une identité masculine rend l’organisation du dépistage du col utérin infaisable. Au-delà des prises en charge chirurgicales, l’information de la participation au dépistage lorsqu’il existe un col utérin ne semble pas bien diffusée ou suivie. Les chiffres sont assez parlants : 27% de dépistage par prélèvement cervico-utérin pour les hommes transgenres pour près de 60% dans la population générale. La majorité des auteurs estime que le risque d’infection HPV est probablement supérieur à la population générale du même âge du fait des pratiques sexuelles et des partenaires multiples. Ailleurs, le traitement androgénique altère la pertinence de la cytologie de dépistage primaire ou de triage (prélèvement souvent insuffisant et pouvant être douloureux en raison de l’atrophie cervico-vaginale générée par les hormones masculines).

Actuellement, aucune donnée n'existe concernant la prévalence du cancer du col de l'utérus parmi les hommes transgenres. Le dépistage du cancer du col doit donc être encouragé pour toutes les hommes trans qui ont un col de l'utérus, quel que soit le sexe de leur partenaire ou leurs pratiques sexuelles.

 

En Synthèse
La conclusion de ces informations est que la vaccination anti HPV est le meilleur moyen de prévention chez les personnes LGBT qui ont un accès moins facile et moins régulier à la prévention secondaire des lésions HPV induites alors que leur risque apparait supérieur. Il faut cependant ne pas oublier que la prévention secondaire doit aussi être associée et donc que l’information doit être portée par tous les personnels soignant au contact des personnes LGBT.