L’ESHRE s'est tenue du 5 au 8 juillet 2020 uniquement en virtuel en raison de la pandémie mondiale de la COVID 19.

Personne ne peut ignorer l'impact du virus sur le domaine de la médecine de la reproduction. Il modifie nos pratiques au quotidien. Il a été rappelé l'importance de tester, de suivre et de tracer les cas afin de prévenir et de stopper sa propagation notamment au sein du personnel soignant et ainsi de permettre aux cliniques de continuer à fonctionner.

W. Essahib (1) a confirmé la présence des récepteurs ACE2, cibles du virus COVID dans les ovocytes humains et sur les blastocystes. Ainsi, une surveillance particulière des grossesses et un suivi néonatal sont nécessaires pendant toute la période de pandémie.

G. Bahadur (2), dans une analyse rétrospective chez des femmes enceintes testées positives pour la COVID-19, a démontré la transmission verticale du virus bien que faible. La présence du virus dans les tissus placentaires, des altérations placentaires, ainsi qu'une augmentation des fausses couches chez les femmes testées positivement pour la COVID 19 ont été retrouvés.

Quelques résumés de sujets présentés durant le congrès concernant l'embryologie, la stratégie de transfert embryonnaire et l’andrologie sont proposés.

1) Embryologie

R. Sturmey (3) a rappelé l’importance du métabolisme embryonnaire ainsi que les exigences qui en découlent pour complémenter les milieux de culture utilisés au sein de nos laboratoires. Il est revenu sur une idée reçue que la consommation de glucose est nécessaire durant l'activation du blastocyste pour satisfaire son besoin énergétique, en réalité ce nutriment est essentiel en amont dès la phase de compaction de l'embryon. Les rôles essentiels du pyruvate et du glucose ont été soulignés, d'autant que les différents milieux de culture embryonnaire n’ont pas, en fonction des fournisseurs,  tous les mêmes concentrations de ces nutriments essentiels.

K. Ezoe (4) a identifié la prolactine comme une cible potentielle thérapeutique à incorporer dans les milieux de culture embryonnaire. En effet, elle influence le développement pré-implantatoire et implantatoire. Les récepteurs de la prolactine ne s’expriment qu'à partir du stade morula chez l’homme, la prolactine stimule l'adhésion du blastocyste ainsi sa supplémentation dans les milieux de culture pourrait améliorer la croissance du blastocyste et ainsi améliorer les résultats de grossesse.

S. Brouillet (5) a présenté une étude où le taux d'oxygène présent dans les incubateurs au cours de la culture embryonnaire a été diminué, passant de 5% à 2% dès le 3ème jour. Il en résulte une amélioration significative des résultats en terme de taux de blastocystes utiles obtenus et des taux cumulés de naissances vivantes. Ce résultat pourrait être facilement mis en pratique dans nos laboratoires.

La question de la méthode : fécondation in vitro (FIV) versus injection intracytoplasmique de spermatozoïdes (ICSI) dans les cas d’infertilité d’origine non masculine fait toujours débat. Q.V. Dang (6) a publié une étude montrant qu’avec l’usage de l’ICSI les taux de fécondation, les taux d’absence totale de fécondation, et enfin les taux de grossesses évolutives n’étaient pas supérieurs qu’en FIV. Ceci remet en cause son usage systématique dans cette indication.

N. de Munck (7) a examiné les différences de comportement morpho cinétique entre les embryons issus de FIV et d’ICSI dans des cycles de diagnostic préimplantatoire (DPI). Après standardisation des 2 techniques sur le temps de disparition des pronoyaux, les temps d'apparition des clivages précoces sont les mêmes par les 2 techniques, tandis que la blastulation ainsi que son expansion se produit plus rapidement pour les embryons issus de FIV. Cependant, le nombre de blastocystes utiles n’était pas significativement diffèrent par les 2 techniques, renforçant l'idée de l'intérêt de l'utilisation de la FIV dans ce cadre.

R. Smith (8) a mis en évidence que le complexe H3.3 Chaperone Hira présent dans l’ovocyte est essentiel pour la formation du pro noyau masculin. Ainsi, chez les modèles de souris déficientes de cette protéine, des fécondations anormales se produisent avec formation d'un simple pro noyau dans l’ovocyte. Chez l'homme dans les ovocytes avec 1seul pro noyau, il a été observé que le complexe Hera chaperonne n'était pas incorporé dans la chromatine mâle. Chez les patients qui ont des échecs répétés de fécondation avec des « 1PN », l’approche de transferts nucléaires ou encore de surexpression des gènes pourrait constituer une thérapie.
 

Blastocyste

Blastocyste

2) Stratégie de transfert embryonnaire et réceptivité endométriale

Le débat existe toujours sur la meilleure stratégie de transfert à adopter entre le transfert d'embryons frais ou congélation de la totalité de la cohorte embryonnaire et transfert différé des embryons congelés : « freeze all »

Actuellement, Il y a une tendance européenne voire mondiale pour l'usage du  « freeze all »

Une étude nordique de K. Westvik Johari (9) démontre que le poids des enfants issus des transferts d'embryons frais est diminué comparé à celui des enfants issus des embryons congelés et que ces 2 groupes étaient plus à risque de naissances prématurées comparativement aux conceptions spontanées.

Etonnamment, T.N.L. Vuong (10) a montré que les enfants issus de transfert d'embryons congelés avaient une meilleure motricité à l'âge de 2 ans versus les enfants issus de transfert d'embryons frais.

Les données préliminaires provenant des études randomisées anglaises sur l’usage du freeze all montrent une baisse du risque du syndrome d'hyperstimulation et une augmentation du taux de naissance vivante chez les femmes « hyper répondeuses ». Cependant, on a observé un allongement du temps pour l'obtention de la grossesse et une augmentation des accouchements prématurés.

G. Oron (11) indique que le taux de grossesse clinique issu du premier transfert d'embryon congelé est meilleur si une grossesse a été obtenue préalablement après le transfert d'embryons frais. Cette information sur le résultat de la tentative précédente doit être prise en compte lors du choix du nombre d'embryons à transférer afin de diminuer le nombre de grossesses gémellaires.

N. Aslih (12) a montré que les résultats en termes de grossesses cliniques sont quasiment doublés lorsque la préparation de l'endomètre est naturelle et non artificielle et ce même lorsque la qualité de l'embryon à transférer n’est pas satisfaisante.

De nombreuses études ont démontré l'intérêt des tests moléculaires de l'endomètre notamment dans les cas de fausses couches répétées d'origine non chromosomique. L’expression des gènes de l'endomètre semble différente chez les femmes qui ont eu 2 ou 3 fausses couches, par rapport aux femmes qui en ont eu plus que 4 (19 gènes identifiés). Ces gènes sont en relation avec des processus biologiques comme l'immunité, la production d’énergie, la sécrétion hormonale, l'adhésion et la prolifération cellulaire.

L’ADN mitochondrial comme marqueur d’implantation embryonnaire semble remis en cause. M. Galain (13) a observé une différence significative du dosage de l’ADN mitochondrial en fonction de l'âge maternel et de la ploïdie mais pas en fonction des taux d’implantation ni des taux de grossesses.

3 ) Andrologie

Il existe de nouveaux tests spermatiques, le potentiel de capacitation comme marqueur de la mesure du potentiel de membrane et de l'évaluation hyperactivation des spermatozoïdes.

D.J. Lamb (14) a examiné le rôle des tests génétiques dans l'évaluation de l’infertilité masculine. A mesure que le nombre de spermatozoïdes diminue, l'incidence des anomalies génétiques augmente. Dans le cas par exemple des tératospermies et des globozoospermies, la présence de délétions, mutations, polymorphismes ont été identifiés.

P. Chung (15) a identifié la phospholipase C zeta sur le gamète mâle, et sa présence serait responsable des échecs totaux de fécondation en ICSI.

La prochaine génération de séquençage va permettre une analyse plus facile d'un panel de gènes associés à l’infertilité masculine ainsi qu’au dysfonctionnement spermatique. Ces données pourront aider à prédire les chances de résultats.

Pour finir sur une note d’espoir : le laboratoire du futur utilisera des techniques non invasives qui permettront d’apprécier simultanément la viabilité des embryons ainsi que leurs génétiques afin d’affiner la sélection des embryons et améliorer le délai et les résultats de grossesse.

Bibliographie

(1) O-319: Les récepteurs de l’hôte ACE2 et CD147 (BSG) du SRAS-CoV-2 sont présents sur les ovocytes humains et les blastocystes.   W. Essahib, G. Verheyen, H. Tournaye, H. Van de Velde.

(2) O-316 : La transmission virale verticale maternelle-fœtale SAR-CoV-2 (COVID-19) pendant les grossesses est possible et ne peut actuellement pas être rejetée.   G. Bahadur, R. Homburg, C. Singh, M. Bhat, P.A. Doreski, J. Huirne, A. Muneer.

(3) PC-17: Au-delà de l’énergie; métabolisme des embryons au 21ème siècle.   Roger Sturmey,

(4) O-63 Prolactin receptor expression and its role in cytoskeletal reorganisation in focal adhesion in human blastocysts.   K. Ezoe, T. Miki, A. Yabuuchi, T. Kobayashi, K. Kato.

(5) O-288 Dynamic oxygen level (5%-2%) during human in vitro embryo culture significantly improves usable blastulation and cumulative live birth rates in in vitro fertilization (IVF).   S. Brouillet, A. Andreeva, A. Gal, A. Ferriere, M. Ana, A. Fournie, V. Lou, N. Ranisavljevic, S. Hamama .

(6) O-167 Intracytoplasmic sperm injection versus conventional in vitro fertilisation in couples with non-male factor infertility: a randomised controlled trial.    Q.V. Dang, L. Vuong, Q. Nguyen, T. H, A. H, B. Truon, Q. Pham4, R. Wa5, R. Norman, B. Mo.

(7) O-166 Marginal differences in preimplantation development between conventional IVF and ICSI in patients with non-male factor infertility: a sibling oocyte study.   N. De Munck, A. Bayram, A. Arnanz, A. Abdal1, I. El-Khatib, A. El-Damen, L. Melado, B. Lawrenz, H.M. Fatemi.

(8) O-64 Histone variant H3.3 chaperone complex, Hira, is essential for male pronucleus formation in mouse and human.   R. Smith, A. Saunderson, S. Pickering, J. Tait, J. Thong, R. Anderson, C.J. Lin.

(9) O-029 Maternal and treatment contributions to perinatal outcomes after transfer of fresh and cryopreserved embryos in assisted reproduction: A Nordic sibling study.   K. Westvik-Johari, L.B. Romundstad, C. Bergh, M. Gissler, A.K.A. Henningsen, S.E. Håberg6, U.B. Wennerholm, A. Tiitinen, A.B. Pinborg, S. Opdahl.

(10) O-031 Development of children born from freeze-only versus fresh embryo transfer: follow-up of a randomized controlled trial.   T.N.L. Vuong, T. Ly, N. Nguyen, L. Nguyen, X. Le, T. Le, K. Le, T. Le, M. Nguyen, V. Dang, R. Norman, B. Mol, T. Ho.

(11) O-255 Does the outcome of fresh embryo transfer affect the outcome of the subsequent frozen-thawed embryo transfer originating from the same cohort of retrieved oocytes.    G. Oron, M. Ronen, A. Wertheimer, E. Shlush, A. Hochberg, A. Ben-Haroush, O. Sapir, Y. Shufaro

(12) O-172 Frozen-thawed embryo transfer in natural cycles leads to higher clinical pregnancy rates compared to artificial endometrial preparation cycles.   N. Aslih, Y. Atzmon, M. Michaeli, A. Bilgory, E. Shalom-Paz.

(13) O-314 Assessment of the predictive value of mitochondrial DNA as a biomarker of embryo viability.   M. Galain, M. Fabbro, S. Menazzi, R. Anria, J. Ponte, F. Nodar, S. Papier, C. Fernandez.

 (14) O-100 Routine and new diagnostic approaches for male infertility: Are new genetic markers near primetime?   D.J. Lamb.

(15) O-299 Attributing ICSI Fertilization Failure to the Responsible Gamete.   P. Chung, S. Cheung, P. Xie, A. Parrella D. Keating, Z. Rosenwaks, G.D. Palermo.

Remerciements à Colleen Lynch, Cooper Surgical