Améliorer la qualité des soins, c’est aussi réduire le temps d’hospitalisation
Catherine UZAN
Prendre en charge un cancer ne consiste plus uniquement à le traiter, mais aussi à réduire la morbidité et les inconvénients liés aux traitements. Notre objectif est également de mieux accompagner le patient dans sa vie pendant et après le cancer.
Pour atteindre cet objectif, le patient est lui-même « une partie de la solution » et quand on évoque le patient, il faut également penser aux associations de patients, qui sont devenues des partenaires incontournables des médecins.
Le 1er objectif de qualité des soins est celui de la réduction du temps passé à l’hôpital. Désormais, de nombreuses interventions ou prises en charge ont lieu en ambulatoire. Actuellement, nous prenons en charge 50 % des cancers du sein en ambulatoire, ce qui était déjà le cas de nombreuses interventions de faible importance, comme les hystéroscopies opératoires ou les coelioscopies diagnostiques.
La démarche de réduire les temps diagnostiques et le stress lié aux « temps intermédiaires » se sont traduits par la mise en place, comme c’est le cas chez nous, de procédures diagnostiques (consultation, imageries et biopsies) « en un jour ».
Mais, cette prise en charge ambulatoire concerne des gestes de plus en plus importants. Nous avons réalisé les premières prises en charge d’hystérectomie avec exploration ganglionnaire en ambulatoire. Mieux encore la chirurgie-robot assistée, qui était l’apanage de la chirurgie en hospitalisation conventionnelle, a désormais fait son apparition dans notre unité de chirurgie ambulatoire.
Cette évolution a dû vaincre les réticences, non seulement des patients, mais également celles des chirurgiens et des médecins traitants qui craignaient d’être confrontés à des pathologies ou des complications liées à une sortie « trop précoce », pathologies auxquelles ils ne seraient pas préparés. Ceci nous a conduits non seulement à réduire la lourdeur des prises en charge post-opératoires, mais également à développer des stratégies préventives de prise en charge des patients à leur sortie de l’hospitalisation. Nous l’avons fait pour des mastectomies réalisées en ambulatoire, et nous le ferons pour bien d’autres pathologies.
Ceci nous conduit également à deux aspects fondamentaux :
- La formation des personnels paramédicaux qui assurent le suivi post-opératoire
- Et d’autre part, la mise en place de techniques de téléconsultation, puisqu’aujourd’hui la télémédecine entre dans le champ des possibilités réglementaires de prise en charge des patients.
Rappelons aussi que la prise en charge en ambulatoire repose sur l’accord du patient et sur le respect scrupuleux de pré-requis parfaitement protocolisés.
Dans le même esprit, les chirurgies conventionnelles avec admission du patient le jour même de l’intervention (procédure J0) en évitant une nuit d’hospitalisation préopératoire, souvent source de stress, sont de plus en plus fréquentes.
Il en va de même des techniques de récupération améliorée après chirurgie (RAAC), qui permettent de limiter le temps passé à l’hôpital, mais surtout d’optimiser en la réduisant la période de récupération des grandes fonctions physiologiques et par conséquence de la qualité de vie des patients.
Enfin, les conditions mêmes de l’hospitalisation visant un label « hospitalité » sont également source de réduction du stress et lié au souvenir du séjour.
Toutes ces procédures de facilitation du retour au domicile reposent très largement sur l’amélioration du lien ville-hôpital et toutes nos démarches qui étaient hospitalo-centrées doivent devenir centrées sur le retour à domicile et une prise en charge la plus rapide possible par le médecin traitant, souvent un médecin généraliste.
C’est dire le rôle croissant de la relation que nous devons, nous chirurgiens, entretenir avec les médecins traitants et les patients eux-mêmes.
Ceci suppose de leur communiquer très rapidement les éléments utiles concernant l’hospitalisation du patient, mais également de recommander à nos patients de retourner voir dès que possible leur médecin traitant pour rétablir ce lien.
Il permettra aux médecins traitants de mieux prendre en charge les patients, de mieux répondre à leurs questionnements et à leurs attentes.
A terme, les téléconsultations ne concerneront pas uniquement les patientes inquiètes ou souhaitant obtenir une réponse à question concernant leurs suites opératoires, mais pourront également permettre d’établir un lien facilité entre l’équipe soignante et le médecin traitant.
Dans cet objectif, on ne peut négliger la question du retour des patientes en urgence lorsqu’elles ont une complication ou si elles craignent d’en avoir une. Trop souvent, le parcours de soins de ces retours sur le site de prise en charge transite par les urgences générales, qui sont parfois le lieu le plus inadapté pour cette prise en charge. Il faut anticiper les questions, faciliter le lien entre la ville et l’hôpital et il faut mettre en place des procédures protocolisées connues des patientes et des médecins traitants pour le retour ou l’attitude à adopter en cas d’urgence (contact dans le service en particulier).
En assurant ainsi une continuité des soins, qui devient le « prendre soin », nous améliorerons très significativement la qualité de vie des patientes et leur retour à une vie normale, personnelle, familiale et sociale. Cette nécessité est particulièrement importante pour les patientes qui souffrent de nombreuses co-morbidités et chez qui l’ensemble des équipes concernées doivent être intégrées à des protocoles anticipant les différentes problématiques.
Pour ces démarches, les associations de patients et leurs représentants peuvent et doivent jouer un rôle important. Il en va de même de l’importance de la mise en place des PQR (Patient Quality Reports).
Le cancer, si il est un moment difficile de la vie des patients, se prête particulièrement bien à cette anticipation des procédures et à leur protocolisation par une réflexion menée en équipes et impliquant les patients eux-mêmes. Le rôle des médecins traitants dans des réunions de retour d’expériences est absolument essentiel. Enfin, rappelons que les soins de support, s’ils concernent l’environnement médical de la qualité des soins et des prises en charge spécifiques (lien avec les équipes de cardiologie pour la prise en charge de certaines chimiothérapies cardio-toxiques par exemple) concernent également des soins directement dédiés à la qualité de vie : onco-psychologie, socio-esthétique, médecine de la douleur, art thérapie, activités sportives, etc…
L’hôpital doit devenir un lieu qui inquiète moins et surtout qui inquiète le moins longtemps possible !